Jérôme Minière / « Une Île » / La tribu
Jérôme Minière offre un 8e album scintillant, pertinent et lucidement contemporain : « Une Île », un clin d’oeil à Montréal notamment, un état d’esprit ouvert vers l’imaginaire, le dessin, la psychologie.
Toujours un peu naïf en apparence, mais critique de nos travers et espiègle, les chansons du Montréalais nous parlent entre autre d’amour, comme le fait magnifiquement le premier extrait, « L’Amour ça s’apprend pas par coeur ». Il s’agit d’une pièce d’une écriture classique, simple et poétique, qui se déploie subtilement, un peu à l’image de cet opus, qui délaisse pratiquement la musique pour danser (à part l’excellente « Thérapie ») et quelque peu l’électronique, qu’on retrouve sur les titres « Une Île au stylo bille », de même que « Je ne suis pas pressé ». Sur « L’Ennui », il nous parachute l’histoire d’un intrus, mêlée à l’idée du bonheur et aux cages d’un zoo (!). Titre fort approprié (voire logique), « Ressources minières », une douce bossa nova, semble parler du sort des régions et de l’île d’Anticosti. Elle aborde en outre les thèmes de l’équilibre et de la liberté. La nostalgique et rêveuse « Dans la cuisine du phare », raconte l’isolement de son gardien, contemplatif devant le temps qui passe, tout comme les navires. Sur un air raïsant, la pièce « Ego Lego » exprime les désillusions de l’artiste face à la société de consommation, son désir de rassemblement social aussi. Ailleurs sur « Bric à bac » ou encore « Jardin sauvage », l’auteur se montre passablement optimiste, serein même. La fine écriture d’Une Île prend sa source d’un spectacle ultérieur de chansons en work-in-progess à l’Usine C, et se veut plus spontanée dans sa réalisation que tout le précédent matériel de l’artiste.
Jérôme Minière avait remporté en 2002 le Félix de l’auteur compositeur de l’année au Gala de l’ADISQ. Déjà en 2001, il y gagnait également le Félix de l’album électronique de l’année, un prix qu’il reconquit en 2013 pour « Jérôme Minière danse avec Herri Kopter ». L’artiste pluridisciplinaire et surdoué a récemment travaillé au théâtre (avec Denis Marleau, chez UBU) et publié un roman, automne 2014 (« L’Enfance de l’art », aux Éditions XYZ) et serait en préparation d’un deuxième. Il a enfin oeuvré à la réalisation sonore des albums de Michel Faubert (« La Fin du monde », en 2006), de Domlebo (« Bricolage ») et de Grenadine (éponyme), tous deux parus en 2014.