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    [Entretien avec le réalisateur Omar Majeed]

    TAQWACORE - La naissance de l’islam punk : Porte ouverte en zone protégée

    8 octobre 2009, 00h15
         |      Article rédigé par Marie-Hélène Brousseau

    En 2004, Michael Muhammad Knight, un jeune musulman américain, écrit Taqwacores, un roman qui met en scène une communauté de punks islamiques installés dans l’état de New York. Ce livre, une réaction à la rigidité de la doctrine musulmane, appelle à une manière libre de vivre sa foi islamique. L’oeuvre devient rapidement une source d’inspiration pour de jeunes musulmans d’Amérique du Nord, qui concrétisent l’expérience punk islamique en fondant des groupes de musique et en chantant leur réalité. Le cinéaste Omar Majeed, un Pakistano-Canadien, signe un documentaire qui présente cette nouvelle fraternité punk : il accompagne les groupes du Taqwa-Tour en tournée américaine, et revisite le Pakistan en compagnie de certains de ces musiciens punks. Taqwacore - The Birth of Punk Islam, produit par Daniel Cross et Mila Aung-Thwin chez Eye Steel Film, sera présenté début octobre au Festival international du film de Vancouver. Il sera présenté à Montréal au Festival du Nouveau Cinéma, avant de prendre l’affiche au Cinéma du Parc. Nous avons rencontré le réalisateur de ce documentaire porte-parole d’une voix islamique vivante et singulière.




    Basim Usmani et Shahjehan Khan de The Kominas performent Suicide Bomb the Gap au Punk House. Photo gracieuseté de Kim Badawi (Reflux Pictures).


    Omar Majeed, Canadien d’origine pakistanaise, étudie le cinéma à Toronto, d’abord en production, puis en cinématographie. Insatisfait du type d’enseignement qui néglige la part créatrice des étudiants, il abandonne les études et intègre comme monteur l’industrie du cinéma. Il travaille beaucoup au montage de magazines pour la télévision torontoise. En 2005, il s’établit à Montréal et abandonne le domaine télévisuel pour retourner à sa première passion : celle de raconter des histoires. Rapidement, Majeed voit poindre en lui les prémisses du sujet de son prochain film. « J’entretenais déjà à ce moment-là un réel désir de raconter une histoire musulmane, dit-il. Je ne viens pas d’une famille pratiquante, on ne m’a jamais demandé de prier, je n’avais jamais pensé à l’islam comme faisant concrètement partie de ma vie. Mais le climat post-11 septembre a suscité chez moi un profond questionnement identitaire. C’est un cliché, certes, mais c’est facile à comprendre : vous êtes musulman, vous vivez en Amérique du Nord, et êtes soudain submergé des commentaires du monde entier sur l’islam. C’est impossible de ne pas réagir, de ne pas réfléchir sérieusement à votre identité. »

    Élevé au Canada, le réalisateur passe aussi une partie de son adolescence au Pakistan. Là-bas, à Lahore, il fréquente l’école américaine et n’est ainsi pas totalement intégré à la culture locale. Il fait face à la méfiance des jeunes Pakistanais, qui le perçoivent parfois comme le riche garçon de l’Ouest. À Toronto, il est l’étrange garçon au teint foncé, et répond aux questions d’usage adressées à un musulman par ses compagnons de classe : celles qui portent entre autres sur la consommation d’alcool et le port du voile. Dans les deux cas, Majeed se retrouve dans une position marginale. Sans avoir d’idée précise sur le genre de film qu’il veut faire, il sait qu’il explorera cette zone d’inconfort. « À l’époque (au début des années 2000), dit-il, on pouvait entendre deux voix musulmanes : la voix fondamentaliste qui brûlait les drapeaux américains, et la voix apologiste qui vantait les vertus de l’islam tout en reniant les actions extrémistes. Je me disais que ce n’était pas aussi clair, que bien sûr l’islam avait une mauvaise réputation démesurée, mais en même temps, je ne me sentais pas à l’aise d’aller dans certaines mosquées et d’entendre des discours de haine. Beaucoup de musulmans ne cadrent pas dans l’un ou l’autre de ces modèles. Je me suis dit qu’il était temps que le monde entende cette autre voix et qu’elle devait venir de la jeunesse islamique. »

    Omar Majeed entend parler de Taqwacores, un roman de Michael Muhammad Knight qui met en scène des islamistes punks et libres-penseurs. Il rencontre Michael, cet enfant américain de père alcoolique et raciste qui, admirateur de Malcom X, se convertit à l’islam à l’adolescence. Michael expose les doutes idéologiques qui l’ont mené à l’écriture de Taqwacores, et parle aussi de ces nombreux musiciens qui le contactent pour lui dire que son livre est une source d’inspiration. Majeed sent qu’il tient son sujet de documentaire. La communauté Taqwacore se tisse d’abord sur le Net. Puis, un soir, Michael et Omar vont voir un show des Kominas. C’est lors de cette soirée que l’idée d’une tournée est lancée.

    En 2007, la caméra monte à bord de l’autobus de tournée. Des groupes de différentes villes se joignent à l’équipe au fil des jours. Parmi les protagonistes, on retrouve les Pakistano-Bostonois Basim Usmani et Shahjehan Khan, membres des Kominas, et Sena Hussain, drag king pakisto-vancouveroise, chanteuse du groupe féminin The Secret Trial Five. Le coeur de cette aventure musicale et idéologique, c’est cette soirée où l’autobus s’arrête au Congrès de la Société islamique d’Amérique du Nord (ISNA) à Chicago. Les groupes du Taqwacore s’inscrivent à la soirée micro ouvert pour la jeunesse, et chantent devant une foule enthousiaste, avant de se faire montrer la sortie par les autorités. « Le sous-titre du film c’est la naissance de l’islam punk, et pour moi ce moment dans le film, c’est cette naissance, raconte le cinéaste. Ces types sont jusqu’ici dans leur tête, lisent ce livre, se rencontrent sur Myspace. Lors de cette soirée, ils annoncent concrètement leurs couleurs au monde islamique. C’est une action risquée, la communauté musulmane étant fragilisée et sur la défensive. La tendance est à encourager l’unité et à éviter les discussions et les remises en question. Je croyais que nous nous ferions jeter violemment hors de la scène ; ça n’a pas été le cas. Le plus surprenant, c’est que les jeunes dans l’auditoire s’amusent... les organisateurs sévissent tout de même, s’appuyant sur des règles restrictives. Encore une fois, la politique passe avant la spiritualité. »

    Certes, les références à l’islam, inhérentes aux titres et paroles des punks Taqwacore, surprennent tous les publics. Si la communauté musulmane est secouée, la clientèle des bars punks traditionnels ne sait pas toujours comment recevoir le message. « Si vous jouez une pièce qui s’intitule Sharia Law in the USA (Kominas) dans un bar punk, le public non musulman peut ne pas comprendre le deuxième degré, explique Omar Majeed. Pour les punks musulmans, c’est une blague : ils mettent en scène une caricature de l’image extrémiste qui est projetée sur eux jour après jour. »

    Aux États-Unis, Taqwacore est déjà considéré comme un mouvement artistique émergent. Pourtant, ses membres se défendent bien de suivre un agenda politique. Ces jeunes punks liés les uns aux autres par une amitié profonde - une fraternité palpable dans plusieurs scènes du documentaire - tiennent d’abord à garder la porte ouverte à toutes les façons de penser, de croire, ou de ne pas croire. « Takwacore est une zone protégée dans laquelle on peut rire de nous-mêmes, se poser les questions difficiles, et avoir du plaisir, soutient Omar Majeed. Pour moi, cette part-là est vraiment islamique. Avant de faire ce film, j’avais un peu honte de mon héritage musulman, parce que je ne savais pas comment aborder cette partie de moi. En voyageant avec ces jeunes punks passionnés, en retournant au Pakistan avec eux, j’ai compris que l’islam était réellement fait de multiples facettes. L’islam punk crée un espace où définir soi-même les termes de sa foi. »

    Omar Majeed travaille avec Eye Steel Film à présenter Taqwacore - The Birth of Punk Islam devant les membres de la communauté musulmane. Au risque de choquer les plus conservateurs, l’équipe désire avant tout susciter réflexions et discussions sur la définition de l’identité islamique.

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